Nous republions cet article de 2013 malheureusement réactualisé par la proximité imminente de la prise d'Alep par Dahesh. Le fond de la problématique reste inchangé.
La plupart des syriens ont fui. Restent les plus démunis, les plus pauvres... et quelques chrétiens auprès d'eux, pour ne pas les abandonner. Une petite communauté trappistine reste à Azeir, non loin de la frontière du Liban. Quatre soeurs itialinennes de Valserena ont choisi l'amitié du Christ comme unique viatique de convivialité avec leurs voisins. Prions pour elles !
Ce samedi 7 septembre, le Pape François a appellé les chrétiens et tous les hommes de bonne volonté à vivre une journée de jeûne et de prière pour la paix en Syrie, au Moyen-Orient et dans le monde, samedi 7 septembre 2013. Il a multiplié les initiatives diplomatiques. La voix de l'Eglise compte dans l'effort pour ramener la paix.
La plupart des diocèses du monde se sont unis à cette démarche et ont proposé des temps de jeûne et de prière. Prenons le temps de regarder l'enseignement de l'Eglise dans sa Doctrine sociale.
« La guerre est un «fléau » et ne constitue jamais un moyen approprié pour résoudre les problèmes qui surgissent entre les nations: « Elle ne l'a jamais été et ne le sera jamais »,car elle engendre des conflits nouveaux et plus complexes. Quand elle éclate, la guerre devient un « massacre inutile »,une « aventure sans retour »,qui compromet le présent et met en danger l'avenir de l'humanité: « Avec la paix, rien n'est perdu; mais tout peut l'être par la guerre » (Compendium de la Doctrine sociale de l'Eglise n° 497).
« La paix s'affirme seulement par la paix, celle qui n'est pas séparable des exigences de la justice, mais qui est alimentée par le sacrifice de soi, par la clémence, par la miséricorde, par la charité ».
Paul VI, Message pour la Journée Mondiale de la paix 1976
Syrie : intervention justifiée ou abstention coupable ?
Dans le Compendium de la Doctrine sociale de l'Eglise.
Sans posséder clairement toutes les données du problème syrien, quel éclairage tirer de l'enseignement de l'Eglise (Compendium de la Doctrine Sociale) concernant la défense des victimes innocentes ?
Al Ghouta sous les bombes, en Syrie
N° 506 Les tentatives d'élimination des groupes entiers, nationaux, ethniques, religieux ou linguistiques, sont des délits contre Dieu et contre l'humanité elle-même et les responsables de ces crimes doivent être appelés à en répondre face à la justice.Le XXème siècle a été tragiquement marqué par différents génocides: du génocide arménien à celui des Ukrainiens, du génocide des Cambodgiens à ceux perpétrés en Afrique et dans les Balkans. Parmi eux celui du peuple juif, la Shoah, prend un relief particulier: « Les jours de la Shoah ont marqué une vraie nuit dans l'histoire, enregistrant des crimes inouïs contre Dieu et contre l'homme ».
La Communauté internationale dans son ensemble a l'obligation morale d'intervenir en faveur des groupes dont la survie même est menacée ou dont les droits fondamentaux sont massivement violés.
Les États, en tant que faisant partie d'une Communauté internationale, ne peuvent pas demeurer indifférents: au contraire, si tous les autres moyens à disposition devaient se révéler inefficaces, il est « légitime, et c'est même un devoir, de recourir à des initiatives concrètes pour désarmer l'agresseur ». Le principe de souveraineté nationale ne peut pas être invoqué comme motif pour empêcher une intervention visant à défendre les victimes. Les mesures adoptées doivent être mises en œuvre dans le plein respect du droit international et du principe fondamental de l'égalité entre les États.
La Communauté internationale s'est également dotée d'une Cour Pénale Internationale pour punir les responsables d'actes particulièrement graves: crimes de génocide, crimes contre l'humanité, crimes de guerre et d'agression. Le Magistère n'a pas manqué d'encourager à maintes reprises cette initiative.
Les Organisations internationales
Vous pouvez consulter ici le site de l'ONU pour mieux connaître son organisation et ses missions: http://www.un.org/fr/aboutun/untoday/security.shtml
Au niveau des Organisations civiles internationales, le devoir de défendre les victimes innocentes des massacres – y compris en intervenant dans des conflits internes - prévaut depuis que les ONG ont eu le courage d'intervenir pour sauver des populations civiles massacrées et d'alerter l'opinion publique internationale. Ces organisations (ONU, OTAN), comme les Etats, qui dans l'urgence, précèdent parfois les mandats internationnaux (France en Côte d'Ivoire), ont peu à peu intégré le « devoir d'ingérence » dans les conflits internes aux Etats, sans pour autant lui donner une base juridique solide, ce qui explique les hésitations actuelles.D'autre part, comment vérifier que les intentions des intervenants sont libres de tous intérêts stratégiques ou économiques ? La médiatisation des effets de la guerre provoque toujours la légitime émotion, mais sans être suffisamment accompagnée des analyses géopolitiques qui permettraient aux citoyens d'entrer dans un jugement prudentiel.
L'appel à l'engagement pour la paix par le jeûne et la prière lancé par le Pape François est un vigoureux rappel que toute action, fût-elle rendue urgente et fondée dans le droit, doit être replacée sous le regard de Dieu qui seul peut désarmer les esprits et ouvrir des chemins non violents.
Martine Mertzweiller